La pandémie de Covid-19 a levé le voile sur une nouvelle forme d'hégémonie qui ne cesse d'étendre son emprise aux États-Unis, au Brésil, au Royaume-Uni, en Italie... Elle a provoqué chez un grand nombre de chefs d'État une série de réactions irrationnelles allant du simple déni aux formes les plus archaïques de superstition, de pensée magique ou de religiosité. Devant une telle avalanche d'absurdités, l'attitude souvent adoptée est celle de la sidération : comment peut-on rester au pouvoir en faisant preuve de tant d'incompétence?
À chacune des étapes qui ont conduit de la première guerre mondiale à l'hypercrise actuelle (sanitaire, climatique, économique, géos tratégique) des pans entiers du savoir accumulé depuis des siècles se sont effondrés, plongeant dans le silence et la nuit l'expérience des hommes. De cette histoire du silence, toute la littérature moderne témoigne. Ce livre enquête sur les rapports entre la littérature et la société, la fiction et le siècle, sur nos différentes manières de dire et d'écrire le monde ; alors que le réel, ironique ou tragique s'échappe toujours...
Depuis qu'elle existe, l'humanité a su cultiver l'art de raconter des histoires, un art partout au coeur du lien social. Mais depuis les années 1990, aux États-Unis puis en Europe, il a été investi par les logiques de la communication et du capitalisme triomphant, sous l'appellation anodine de « storytelling ». Derrière les campagnes publicitaires, mais aussi dans l'ombre des campagnes électorales victorieuses, de Bush à Sarkozy, se cachent les techniciens sophistiqués du storytelling management ou du digital storytelling, pour mieux formater les esprits des consommateurs et des citoyens.
C'est cet incroyable hold-up sur l'imagination des humains que révèle Christian Salmon dans ce livre, au terme d'une longue enquête consacrée aux applications toujours plus nombreuses du storytelling : le marketing s'appuie plus sur l'histoire des marques que sur leur image, les managers doivent raconter des histoires pour motiver les salariés, les militaires en Irak s'entraînent sur des jeux vidéos conçus à Hollywood et les spins doctor construisent la vie politique comme un récit. Christian Salmon dévoile ici les rouages d'une « machine à raconter » qui remplace le raisonnement rationnel, bien plus efficace que toutes les imageries orwelliennes de la société totalitaire.
Un ouragan emporte nos sociétés hyperconnectées et hypermédiatisées. Le vent a tourné, nous l'éprouvons tous fortement. L'époque n'est plus seulement à la manipulation et au formatage des esprits, comme encore au milieu des années 2000, quand régnait sur le discours médiatico-politique le storytelling.
L'explosion du Web, l'éclosion des premiers réseaux sociaux créaient l'environnement favorable à la production et à la diffusion d'histoires. Or, de même que l'inflation ruine la confiance dans la monnaie, l'inflation des stories a érodé la confiance dans les récits. Le triomphe de l'art de raconter des histoires, mis au service des acteurs politiques, a entraîné, de manière fulgurante, le discrédit de la parole publique...
Dans le brouhaha des réseaux et la brutalité des échanges, la story n'est plus la clé pour se distinguer. La conquête de l'attention, comme celle du pouvoir, passe désormais par l'affrontement, la rupture, la casse des « vérités ». Désormais, viralité et rivalité vont de pair. Fini le storytelling ? Bienvenue dans l'ère du clash !
Yakov Blumkine prétendait avoir eu neuf vies et fut notamment l'assassin de l'ambassadeur d'Allemagne, un poète proche de l'avant-garde, le secrétaire de Trotski et un atout stratégique essentiel en diverses occasions et latitudes. Suivre au plus près les déplacements de cette figure historique, décisive mais fantomatique, exigeait une nouvelle forme de récit. Initié il y a plus de trente ans, Le Projet Blumkine propose un voyage insolite sur les pas d'une légende oubliée de la révolution russe.
Il y a plus de trente ans, Christian Salmon renonçait au projet d'écrire la vie d'une légende oubliée de la Révolution russe : Iakov Blumkine, terroriste, tchékiste, poète, stratège militaire, agent secret, exécuté à l'âge de vingt-neuf ans sur ordre de Staline.
Les années ont passé jusqu'à ce que l'auteur découvre à l'occasion d'un déménagement une malle contenant les archives du projet Blumkine : des manuscrits, des documents, de rares photographies, et des souvenirs personnels.
Il décide alors de reprendre le projet Blumkine et propose ici un récit biographique inclassable, à l'image de ce personnage pris dans les reflets de sa légende : l'enfant romantique d'Odessa, l'assassin de l'ambassadeur d'Allemagne en 1918, le poète qui fréquente Isadora Duncan et l'avant-garde artistique du début des années 1920, le guerrier et le stratège qui reconquièrent la Mongolie, l'agent du NKVD en Palestine, le secrétaire de Trotski... L'auteur entreprend un voyage sur les pas de ce jeune homme qui prétendait avoir eu neuf vies et qui avait tout d'un amant authentique de la poésie et d'un tueur-né . Un voyage qui le mène d'Odessa à Moscou, d'Istanbul jusqu'aux plateaux du Tibet...
Mais les événements se télescopent : la vie du héros rencontre celle de l'auteur, l'Histoire percute les soubresauts du présent. Le projet Blumkine change alors de nature, il déborde de son cadre, la chronologie est pulvérisée, le biographe est à la peine. Un autre voyage commence...
christian salmon examine ici les formes nouvelles que prend la censure dans le monde bouleversé de l'après-11 septembre 2001.
ii montre comment, dans une société désormais globalisée, l'économie des discours est moins régulée par l'interdit ou l'exclusion que par l'inflation, par la diffusion mondiale des mêmes schèmes. dans cette nouvelle phase du capitalisme culturel, le contrôle des contenus par appropriation des contenants, la commercialisation du "temps de cerveau disponible" se conjuguent à un phénomène nouveau : la récupération de la pulsion narrative.
aux etats-unis, tout particulièrement, le storytelling est devenu, en communication politique, en diplomatie, en marketing, une nouvelle manière de dynamiser et de formater les "messages", de leur conférer une force de résonance (esthétique, psychoaffective) identique à celle des "histoires" dont notre imaginaire se nourrit, et propre à déterminer et à rentabiliser leur réception.
paru en 2002 aux éditions climats, cet essai très stimulant a été réactualisé par l'auteur, qui l'a enrichi de ses travaux récents, et recentré sur ses aspects les plus directement liés aux enjeux démocratiques et citoyens.
Le storytelling des hommes politiques et son décryptage compulsif par les médias sont devenus en quelques années les deux mamelles d'une démocratie envoûtée, qui a substitué le récit à l'action, la distraction à la délibération, le stage craft (l'art de la mise en scène) au state craft (l'art de gouverner). La politique est passée de l'âge de la joute à celui de l'interactif. Du storytelling à la performance narrative, de la diversion à la dévoration des attentions.
L'homme d'État apparaît de moins en moins comme une figure d'autorité, une instance productrice de normes et de plus en plus comme quelque chose à consommer, un artefact de la sous-culture de masse.
C'est là le résultat d'une certaine impuissance à exercer le pouvoir, sous l'effet conjugué du néolibéralisme et des nouvelles technologies. Désacralisé, profané par les médias, ridiculisé par les marchés, soumis à la tutelle des institutions internationales et des agences de notation, l'État est désormais ce trou noir qui aspire ce qu'il reste du rayonnement du politique. L'homo politicus y apparaît non plus comme le porteur du changement annoncé, mais comme un spectre éclairé par les flammes de sa propre dévoration.
La com' politique ne vise plus seulement à formater le langage, mais à capter et à plonger les esprits dans cet univers spectral dont les hommes politiques sont à la fois les performers et les victimes...
La fin de l'année 2007 fut marquée par un succès de librairie inattendu. En 2007, le livre Storytelling, succès de librairie inatendu, marquait l'irruption, dans la société française, d'une problématique politique devenue depuis omniprésente : comment les histoires sont devenues des outils de contrôle pour les pouvoirs. Mais seul un aspect de cette question a été retenu ; le pouvoir politique est soudain devenu l'objet d'un décryptage massif, chacun se livrant à cette analyse en tâchant de comprendre comment celui-ci se mettait en récit, avec ses temps forts et ses temps faibles, avec ses personnages principaux, ses théâtres et ses zones d'ombre... Les autres aspects du Storytelling ont été purement et simplement évacués. C. Salmon avait pourtant porté son analyse sur des champs couvrant l'ensemble de la société : le niveau microéconomique de l'entreprise, le niveau juridico-politique, le niveau macropolitique et le niveau individuel.
C'est en quelque sorte à rétablir cette réception biaisée, ou partielle, que l'auteur s'emploie ici, en regroupant l'ensemble des chroniques (à raison d'une par semaine et enrichies, pour le livre, de quelques inédits) publiées dans Le Monde tout au long de l'année 2008. De l'utilisation par Washington de scénaristes hollywoodiens, en passant par la campagne de publicité d'une célèbre voiture italienne, jusqu'au rôle joué par les séries télévisées dans la "guerre contre le terrorisme" tous ces textes sont traversés par une même ligne, une même tension : ils montrent que tous les aspects de nos vies sont consciemment investis par la création de récits censés nous manipuler émotionnellement en nous rattachant à un objet, une situation, une stratégie, des personnages... Ils montrent aussi, sur le modèle de ce que Foucault mettait au jour dans la Volonté de savoir, que nous sommes nous-mêmes mobilisés pour créer nos propres récits.
Comment Kate Moss est-elle devenue une véritable star dont le monde entier imite le look ? C'est à cette question ? moins innocente qu'il n'y paraît ? qu'entend répondre Christian Salmon dans ce livre original. Il s'intéresse bien sûr à la success story de cette anglaise d'origine modeste... Mais surtout, il développe l'idée de l'émergence d'un mythe collectif à l'ère du néolibéralisme triomphant : Kate Moss personnifie la flexibilité, le nomadisme et le transformisme, précisément les idéaux-types du néo-management des années 1990. À travers le corps maigre et mobile de Kate Moss, se construit ainsi la figure d'un nouveau sujet, incertain, précaire, flexible et même « liquide », qui se déploie du début des années 1990 jusqu'à la crise actuelle. En ce sens, elle incarne à la fois la fin d'un monde et l'aube d'une ère nouvelle.
Depuis la fatwa lancée contre Salman Rushdie, les meurtres d'écrivains se sont multipliés, en Iran, en Algérie, en Afghanistan, en Égypte... Mais la censure prend aussi de nos jours des formes moins repérables, celles qui installent partout le règne de l'homogène et sa phobie de l'art et de la fiction.Car la fiction menace le monde. Et le monde s'efforce de la conjurer. C'est une lutte sans répit, un combat inégal qu'interrompt souvent le gong des hôpitaux psychiatriques, ou simplement l'épuisement et la mort. Gogol signe sa reddition, brûle ses papiers et meurt. Kafka se tait et remet sa silhouette aux biographes et aux embaumeurs. Flaubert s'endort en colère. D'autres destins sont aussi évoqués:ceux de Broch, de Gombrowicz, de Kis...Mais la fiction ne cesse pourtant de rebondir; ailleurs, aux confins de la langue et du territoire. Bouleversant les usages, heurtant le goût et les tabous, elle va son chemin et revendique son indépendance. C'est ce combat que raconte Tombeau de la fiction, qui peut aussi se lire comme un manifeste pour la liberté littéraire.
Que se passe-t-il dans la présidence de François Hollande ? L'hallucinante succession d'affaires, de tête-à-queue idéologiques, de télescopages entre vie privée et vie publique, de remaniements surprise, est-elle imputable uniquement à un homme ? De quoi le jeu délétère des alliances temporaires, Hollande-Valls, Valls-Montebourg, et les autres, relève-t-il ? Valls a-t-il une chance, seul ? Y a-t-il encore quelqu'un qui tienne le pouvoir ou bien est-il passé ailleurs ? De quoi retourne-t-il dans la grande confusion politique actuelle ?
De la fin d'un régime, démontre Christian Salmon, après une enquête de près de deux ans. Ce n'est pas seulement à la chute de la maison Hollande à laquelle il nous est donné d'assister mais aux derniers jours de la Ve République. C'est ce qui donne à l'exercice du pouvoir par François Hollande son côté crépusculaire si fascinant à observer et si inquiétant.
L'auteur a plongé au coeur de l'exécutif, là où le pouvoir présidentiel, naguère tant magnifié, se donne à voir dans son dénuement et son désarroi. Son livre raconte un pouvoir à l'agonie, au fil des confidences qu'il a recueillies auprès de plusieurs ministres et leurs conseillers.Christian Salmon est écrivain et essayiste. Son essai Storytelling (2007) est devenu un classique de la communication politique. En 2013, il a publié La Cérémonie cannibale (Prix de l'Essai-L'Express). Il collabore régulièrement à Mediapart.
Par l'auteur de Storytelling (La Découverte) 100.000 ex. vendus !
Le sarkozysme se caractérise depuis son accession au pouvoir par un flot quasi infini de commentaires. On ne compte plus les essais, les portraits complaisants ou au vitriol, les couvertures de magazines qui lui sont consacrés. Mais, si Sarkozy suscite autant de réactions, c'est qu'il fut le premier à mettre en oeuvre les techniques du storytelling imaginées aux Etats Unis. Car aujourd'hui, raconter des histoires est devenu un moyen de séduire et de convaincre, d'influencer un public et des électeurs. Cela signifie aussi transmettre des informations, formaliser des discours et. formater des esprits.
Dans cet essai, Christian Salmon nous offre une analyse corrosive du nouvel Homo politicus tels que Nicolas Sarkozy mais aussi Barack Obama, Silvio Berlusconi, Ségolène Royal, Tony Blair ou encore François Hollande le façonnent, chacun à leur manière, à coup d'histoires, de mythes et de légendes. Sarkozy (et Obama) ou l'art de raconter des histoires nous propose de réfléchir à la naissance de ce " nouveau Prince ", chef d'Etat composite, doté de traits empruntés aux uns et aux autres, un Prince mutant qui signe la mort du politique, un homme d'Etat iconique, fatal et... irréel.
A l'instar du Prince de Machiavel dont il emprunte le découpage, ce n'est pas un ouvrage de morale politique mais plutôt un guide de voyage dans les démocraties contaminées par l'hypermédiatisation et la novélisation du politique.
Les réalités et mensonges du " nouvel ordre narratif " en politique.
Une plongée dans les antichambres du pouvoir et de la communication.
Une analyse salutaire des signes, images et postures du sarkozisme.
" J'en suis revenu, au bout de dix ans, de cette ambition de créer une organisation mondiale dont la.
Légitimité reposerait sur un certain nombre de grands auteurs, de grands noms de la littérature. Une société au capital symbolique. Non pas une société anonyme mais un groupe d'Auteurs Connus, une association d'Illustres. D'où le malentendu constant avec les médias : qui êtes-vous ? D'où parlez-vous ? Voilà les questions de l'inquisition médiatique ! Nous sommes des ombres. Des ombres qui se déplacent guidées par des voix.
À la recherche des voix. Comme on le fait lorsqu'on est perdu en forêt. Des ombres qui parlent à des ombres. Des voix qui s'interpellent dans l'obscurité. Pour écouter et entendre. II faut devenir ombre ! C'est vrai des individus, c'est aussi vrai des agencements collectifs. Voilà ! Nous allons perdre le nom de Parlement. Nous allons, comme dirait Deleuze, "défaire le visage ", devenir imperceptibles. Tant pis pour les physionomistes du pouvoir et des médias.
Nous entrons dans la clandestinité ! " À l'occasion du dixième anniversaire de sa création, le Parlement international des écrivains a décidé de s'autodissoudre. Christian Salmon qui en fut l'animateur s'en explique dans ces entretiens. Avec Joseph Hanimann, correspondant à Paris de la Frankfurter Allgemeine Zeitung, il revient sur une décennie d'engagement et tente d'explorer les voies et les formes d'une nouvelle politique littéraire.